L’Asie maintenant 2022 Bae Bien-U, Anne de Henning, Wifredo Lam et Ram Rahman
Pour la quatrième année consécutive, le MNAAG s'associe à la foire d’art contemporain Asia NOW et accueille le travail de quatre artistes : Bae Bien-U, Anne de Henning, Wifredo Lam et Ram Rahman. Leurs œuvres sont présentées dans un dialogue avec celles des collections permanentes, et investissent tous les espaces du musée.
Le MNAAG présente les photographies de l’artiste coréen Bae Bien-U (né en 1950), au sein des collections permanentes coréennes. Depuis une quarantaine d’années, ses œuvres au langage universel reflètent avant tout la préoccupation du peuple coréen à vivre en harmonie avec la nature. Bae Bien-U excelle dans la photographie en noir et blanc où la nature semble en perpétuel mouvement. Il capture le mouvement des arbres comme s’ils étaient en marche vers un ailleurs que son cadrage ne laisse pas deviner. Ses photographies évoquent la tradition de l’encre, la calligraphie, autant que la présence singulièrement forte des forêts en Corée, dans la peinture lettrée de paysages. La série sur l’Alhambra, réalisée entre 2006 et 2008, est présentée au 2e étage du musée, alternant paysages et vues d’architecture, effets atmosphériques et jeux de lumière.
Au 2e étage, l’exposition Témoigner de l'histoire en marche : Anne de Henning atteste de l’histoire de la création du Bangladesh, depuis le conflit qui éclate en mars 1971 jusqu’à son indépendance un an plus tard le 7 avril 1972. Exposées pour la première fois en 2021 à Dacca pour célébrer les 50 ans de l’indépendance du Bangladesh, les photographies d’Anne de Henning, jamais présentées au public auparavant, sont pour la première fois visibles à Paris. Anne de Henning embarque en février 1969 à bord du Transsibérien armée de deux appareils photos – pour le noir et blanc et pour la couleur, afin de couvrir la guerre du Vietnam à l’âge de 23 ans. Elle est l’une des pionnières en photojournalisme de guerre, l’une des seules femmes à risquer sa vie pour documenter la situation instable de l’Asie des années 1970. Lorsque les manifestations débutent en mars 1971 dans l’est du Pakistan, elle rejoint clandestinement le pays, fermé aux journalistes étrangers, et couvre la zone de guerre dès les premiers jours du conflit, entre les 7 et 10 avril 1971. Elle y retourne en 1972, où elle réalise parmi les seuls portraits couleur du père fondateur du Bangladesh, Sheikh Mujibur Rahman (assassiné en 1975).
Si l‘œuvre peinte de Wifredo Lam (1902-1982) est connue pour sa proximité avec plusieurs mouvements d’avant-garde de la modernité artistique du 20e siècle (Cubisme, Surréalisme, CoBrA), son œuvre céramique est moins familière du public. Le musée présente une série inédite de 20 céramiques, confession intime de son enfance passée dans la communauté chinoise de Cuba, en dialogue avec une sélection de porcelaines de Chine de ses propres collections au 2e étage, afin d’illustrer le lien entre Lam et la culture lettrée héritée de son père, d’origine chinoise. Wifredo Lam produit quelques 300 pièces entre les années 1960 et 1970, employant des techniques variées, d’une grande créativité ludique – les décors en sgraffito, la superposition d’émaux au pistolet compresseur ou l’intégration de morceaux de verre collés à la barbotine. Elles sont, comme ses peintures, peuplées de personnages fantasmagoriques. L’artiste trouve un souffle nouveau créatif tout en poursuivant son exploration de l’inconscient et de la spontanéité gestuelle.
Dans la Galerie Riboud au 1er étage, le MNAAG présente la série Street Smart du photographe contemporain indien Ram Rahman (né en 1955). L’artiste y a saisi toute la vibrante culture visuelle des rues indiennes, avec ses curieuses juxtapositions de publicités, d’affiches de cinéma, de slogans politiques, d'icônes religieuses et de graffitis qui abondent dans les rues indiennes. Son utilisation de la photographie noir et blanc crée des images qui ressemblent à des collages. Ces assemblages fortuits, souvent à grande échelle, sont les décors dans lesquels se déroule la vie quotidienne dans ce théâtre de rue, capturant le chaos, l'ironie et l'humour de la culture publique indienne. Cet art populaire aléatoire reflète les aspirations, les rêves cinématographiques, et commente les questions politiques actuelles, l’histoire et la mythologie dans des combinaisons improbables d’images peintes à la main, d’affiches et de panneaux offset, d’imagerie numérique proliférante, qui sont autant d'éléments de cette culture pop qui a survécu à l'homogénéité aseptisante du consumérisme mondial.